Ne forçons point notre talent, Nous ne ferions rien avec grâce : Jamais
un lourdaud, quoi qu'il fasse, Ne saurait passer pour galant. Peu de
gens, que le Ciel chérit et gratifie, Ont le don d'agréer infus avec la vie.
C'est un point qu'il leur faut laisser, Et ne pas ressembler à l'Ane de
la Fable, Qui pour se rendre plus aimable Et plus cher à son maître,
alla le caresser. "Comment ? disait-il en son âme, Ce Chien, parce qu'il
est mignon, Vivra de pair à compagnon Avec Monsieur, avec Madame ;
Et j'aurai des coups de bâton ? Que fait-il ? il donne la patte ;
Puis aussitôt il est baisé : S'il en faut faire autant afin que l'on me
flatte, Cela n'est pas bien malaisé. " Dans cette admirable pensée,
Voyant son Maître en joie, il s'en vient lourdement, Lève une corne
toute usée, La lui porte au menton fort amoureusement, Non sans
accompagner, pour plus grand ornement, De son chant gracieux cette action
hardie. "Oh ! oh ! quelle caresse ! et quelle mélodie ! Dit le Maître
aussitôt. Holà, Martin bâton! " Martin bâton accourt ; l'Ane change de ton.
Ainsi finit la comédie. |