A
Monseigneur le duc de Bourgogne
Un chat contemporain d'un fort jeune
Moineau Fut logé près de lui dès l'âge du berceau ; La Cage et le Panier
avaient mêmes Pénates. Le Chat était souvent agacé par l'Oiseau : L'un
s'escrimait du bec, l'autre jouait des pattes. Ce dernier toutefois
épargnait son ami. Ne le corrigeant qu'à demi Il se fût fait un grand
scrupule D'armer de pointes sa férule. Le Passereau moins circonspect,
Lui donnait force coups de bec. En sage et discrète personne, Maître
Chat excusait ces jeux : Entre amis, il ne faut jamais qu'on s'abandonne
Aux traits d'un courroux sérieux. Comme ils se connaissaient tous deux
dès leur bas âge, Une longue habitude en paix les maintenait ; Jamais en
vrai combat le jeu ne se tournait ; Quand un Moineau du voisinage S'en
vint les visiter, et se fit compagnon Du pétulant Pierrot et du sage Raton.
Entre les deux oiseaux, il arriva querelle ; Et Raton de prendre parti.
Cet inconnu, dit-il, nous la vient donner belle D'insulter ainsi notre
ami ! Le Moineau du voisin viendra manger le nôtre ? Non, de par tous
les Chats ! Entrant lors au combat, Il croque l'étranger. Vraiment, dit
maître Chat, Les Moineaux ont un goût exquis et délicat ! Cette
réflexion fit aussi croquer l'autre. Quelle Morale puis-je inférer de ce
fait ? Sans cela toute Fable est un oeuvre imparfait. J'en crois voir
quelques traits ; mais leur ombre m'abuse, Prince, vous les aurez
incontinent trouvés : Ce sont des jeux pour vous, et non point pour ma Muse
; Elle et ses Soeurs n'ont pas l'esprit que vous avez.
Version
de Pierre Perret
Un greffier cassant son oeuf coque Pour son p'tit dej' matinal Eut comment
dire un certain choc De voir un piaf dans son casse-dalle. Comme il avait
encore trois ans A se farcir dans sa cellotte Le gros trouve plutôt
marrant Que césarin devienne son pote; L'autre s'en déclare ravi Et
gazouille pour lui faire plaisir. Mais le greffier tait son envie Et ses
boyaux poussent des soupirs. un jour, un deuxième moineau Entifle à son
tour dans la place Et offre un super concerto. Histoire de rompre un peu
la glace Les deux piafs veulent savoir alors Lequel des deux chante le
plus fort. Raminagrobis énervé Fatalement sortit de ses gonds Et dans
ses perchoirs acérés Croque d'un coup le p'tit second. Mais dit-il, c'est
qu'c'est vachement bon C'est délicieux, même sans pain. Et avant de
digérer l'second Il becquète aussi son p'tit copain.
Moralité: Si
t'apprivoises un crocodile File lui des choux, des haricots, Ca lui s'ra
sûrement moins facile De prendre tes miches pour un gigot. |