La nation des Belettes, Non plus que celle des Chats, Ne veut aucun bien
aux Rats ; Et sans les portes étrètes De leurs habitations, L'animal
à longue échine En ferait, je m'imagine, De grandes destructions. Or
une certaine année Qu'il en était à foison, Leur Roi, nommé Ratapon,
Mit en campagne une armée. Les Belettes, de leur part, Déployèrent
l'étendard. Si l'on croit la renommée, La Victoire balança : Plus
d'un guéret s'engraissa Du sang de plus d'une bande. Mais la perte la
plus grande Tomba presque en tous endroits Sur le peuple Souriquois.
Sa déroute fut entière, Quoi que pût faire Artarpax, Psicarpax,
Méridarpax, Qui, tout couverts de poussière, Soutinrent assez longtemps
Les efforts des combattants. Leur résistance fut vaine : Il fallut
céder au sort : Chacun s'enfuit au plus fort, Tant Soldat que Capitaine.
Les Princes périrent tous. La racaille, dans des trous Trouvant sa
retraite prête, Se sauva sans grand travail. Mais les Seigneurs sur leur
tête Ayant chacun un plumail, Des cornes ou des aigrettes, Soit
comme marques d'honneur, Soit afin que les Belettes En conçussent plus
de peur, Cela causa leur malheur. Trou, ni fente, ni crevasse Ne fut
large assez pour eux, Au lieu que la populace Entrait dans les moindres
creux. La principale jonchée Fut donc des principaux Rats. Une tête
empanachée N'est pas petit embarras. Le trop superbe équipage Peut
souvent en un passage Causer du retardement. Les petits, en toute
affaire Esquivent fort aisément ; Les grands ne le peuvent faire. |