Un
chat, nommé Rodilardus, Faisait des rats
telle déconfiture Que l'on n'en voyait
presque plus, Tant il en avait mis dedans
la sépulture. Le peu qu'il en restait,
n'osant quitter son trou, Ne trouvait
à manger que le quart de son soûl ; Et
Rodilard passait, chez la gent misérable, Non
pour un chat, mais pour un diable. Or
un jour qu'au haut et au loin Le galand
alla chercher femme, Pendant tout le
sabbat qu'il fit avec sa dame, Le demeurant
des rats tint chapitre en un coin Sur
la nécessité présente. Dès l'abord, leur
doyen, personne fort prudente, Opina
qu'il fallait, et plus tôt que plus tard, Attacher
un grelot au cou de Rodilard ; Qu'ainsi,
quand il irait en guerre, De sa marche
avertis, ils s'enfuiraient en terre ; Qu'il
n'y savait que ce moyen. Chacun fut de
l'avis de Monsieur le Doyen : Chose ne
leur parut à tous plus salutaire. La
difficulté fut d'attacher le grelot. L'un
dit : " Je n'y vas point, je ne suis
pas si sot ", L'autre : " Je
ne saurais. " Si bien que sans rien
faire On se quitta. J'ai maints chapitres
vus, Qui pour néant se sont ainsi tenus
; Chapitres, non de rats, mais chapitres
de moines, Voire chapitres de chanoines. Ne
faut-il que délibérer, La cour en conseillers
foisonne ; Est-il besoin d'exécuter, L'on
ne rencontre plus personne.
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