C'est moi qu'on appel Crassou,
à cause de mes culottes
pleins de trous.
Quand t'est venu à l'école tu m'avais assis sur tes
genoux.
Cette année j'ai pas pris de chance,
Je t'ai écrit sans
attendre
j'avais pas ton adresse au juste
j'ai fouillé dans les pages
blanches à la place.
J'ai choisi n'importe quelle porte,
je sais bien que
c'est toi qui ouvrira la poste
Tu te caches sous bien des barbes,
Mais tu
sauras bien assécher nos larmes.
On n'approche encore de Noël.
Et pi pour moi c'est encore
pareil.
J'ai toujours de la peine à ce temps-ci,
J'espère que ma lettre
arrivera cette fois-ci.
J'ai pas grand chose à te demander,
en plus c'est pas
pour moé.
Mais c'est dure quand on est dans la pauvreté.
On peut pas
autant se faire écouter.
Tu connais la petite Mélanie,
Celle qui pleure tout le
temps à chaque Midi,
pour avoir une poupée comme Barbie,
même toute nue
qu'à m'a déjà dit.
Elle est tellement pauvre elle,
Qu'à fouille des fois
dans les poubelles.
Comment veux-tu qu'elle aie des bébelles ?
Elle a
personne pour s'occuper d'elle.
Tu dois connaître aussi le vieux Guédille.
C'est lui que
couche toujours sur sa grille,
yé facile à reconnaître avec ses béquilles,
C'est le seul robineux avec des souliers de quilles.
Je sais bien que les fêtes c'est pas pour nous,
C'est pas
Noël sans les bouts de choux.
Je regarde passer le monde, les bras
chargés,
de tous ces cadeaux et de ces paquets bien
emballés.
Mais quand j'écoute la messe de minuit,
avec mes amis
devant la vitrine chez Dupuis,
On se dit la même chose depuis des années,
On sait bien qu'un jour tu viendras nous trouver.
Moi et Mélanie on est dans cour d'école,
ou on traîne
dans ruelle à rêver aux étoiles,
Le vieux Guédille lui dors sur sa
grille,
ou sous quelques journaux devant une vitrine.
Mélanie se contenterait d'une poupée vieillie,
Guédille
d'une bouteille, même à demi.
ou d'un morceau de foulard à moitié moisi,
Et si jamais y avait de quoi manger tu serais béni.
Si Jamais d'ici le soir de la nativité,
Tu trouvais
quelques heures pour me trouver,
avec seulement quelques petites choses
enveloppées,
je pourrais enfin voir un Noël illuminé.
Et qui sait peut-être que pour toi aussi,
en ayant la
chance de passer dans nos vies,
tout en devenant porteur de magie,
cette
journée en serait une bénie.
Peut-être retrouverais-tu au fond de toi ?
Au fin fin
fond de toi,
Ce gros homme à barbe en qui l'on n'ose plus croire,
Ce
marchand de bonheur enterré sous les boîtes.
Je te remercie Père Noël à l'avance,
Je sais dans mon
cour que j'ai la bonne adresse.
Du petit Joël celui que te souffle sa
détresse,
Et qui te demande pour étrenne une simple
caresse...